jeudi 14 janvier 2010

La raquette brisée


J’ai brisé mes raquettes.

Fallait m’y attendre, elles ont vu plus d’hivers que moi.
Mais je vais les réparer encore.
Bien sur, je pourrais en acheter de nouvelles, modernes, en kevlar et en aluminium, mais je ne le ferai pas.
Ces raquettes là ne laissent pas de traces.
Les miennes, mon père a marché dedans, avant. Elles ont sa mémoire. Et alors elles me servent aussi de boussole, puisque si elles m’ont trouvé, c’est que mon père ne s’est jamais perdu.
Et celui qui les portera après moi saura ou je suis passé.
Elles sont comme çà un livre, aussi.

Le vent s’est levé tantôt, et les arbres craquaient sur la montagne, à l’heure ou la chouette tourne la tête. C’est comme çà que je m’en suis aperçu, pour ma raquette.
Le bois appelle le bois.
Qu’est-ce qu’elles appellent, les raquettes de métal?

Peut-être, bien sur, que c’est simplement que je deviens vieux. Les vieux se méfient des choses nouvelles. Après le milieu du chemin, çà se met à parler plus fort derrière que devant et les vieux souliers ont plus d’arguments que n’en auront jamais les neufs.

Alors je suis revenu, doucement, en faisant attention aux souches cachées et en enjambant les troncs couchés.
Et le retour à peine entamé, un geai m’a grincé que je n’avais qu’à suivre mes pas.
Mais comment je pourrais?, que je lui ai dit. Puisque je les emporte avec moi...

Quand la neige aura fondu bagages, je les accrocherai de nouveau au mur, mes raquettes, mais vous ne le ferez pas.

Les vôtres sont muettes, les miennes une mappemonde.

12 commentaires:

pepe a dit...

Et vlan, voilà que tu me fais encore réaliser certaines choses, ces choses de la vie qu'on prend pour acquis mais que finalement je ne comprend qu'a moitié sinon peu. Je me suis empressé d'accepter les vielles raquettes de mon père, lesquelles ont arpentées les bois de St-Donats à mes pieds plus qu'aux pieds d'autres. Ma soeurs de s'exclamer "Mais tu ne viens pas de t'en acheter récemment?" Bin non que je répond. Sûr de moi. Et bien en fait il y avait sur mon mur une paire de ces trucs en métal... que j'avais éliminé de mon esprit comme fesant partie de la famille des raquettes. Ce qu'elles appellent celles là? Du synthétique comme vêtement produit avec des residus de pétrôle et de la machinerie pour dammé les pistes pour ces PERFORMANTS qui brûlent des calories à base de produit hypertransformé. Ils sont dans une nature dénaturé et si ils y voient quelquechose ces bien les vêtements des autres pour en leurrer la marque..

Bah p't'etre pas mais ces ce que ca me fait reflechir les beaux mot de CJ!

pepe a dit...

bon c'est plutôt lorgner que leurrer, mon dictionnaire...

Marie-Claude Courteau a dit...

Tu sais tellement bien dire, mon frère, le souvenir et le respect.

Merci.

Marie-Claude Courteau a dit...

Courteau mon vieux câlisse tu me fais tripper! Ya pas de racket dans tes paroles. C'est du vrai, comme toi d'ailleurs. je te salue bien bas, cher beau-frère.

NDL

Anonyme a dit...

Quand est-ce qu'on devient vieux ?
On devient vieux quand les raquettes restent accrochées au mur, année après année, accumulant la poussière.
On devient vieux quand on ne répond plus au geai, soit qu'on ne l'entend plus, soit qu'on s'en fout.
On devient vieux quand on n'a plus aucun espoir que quelqu'un porte nos raquettes après nous et voit et entende ce que nous avons vu et entendu.
On devient vieux quand on ne peut plus, comme vous, rendre hommage à son père et à ses vieilles raquettes rafistollées qui, comme ses vieux souliers, ont beaucoup voyagé...
Alors dans ce cas, monsieur, vous êtes d'une éternelle jeunesse...

R

Anonyme a dit...

Ayoye...moi qui pensais aller m'acheter des raquettes modernes en graphite super légères...m'a y r'penser...

J'ai-tu rêvé oubedon si t'as changé la photo du poulet surfant ?

Renata

Jean-Louis Courteau a dit...

Bin en fait;çà dépend de l'utilisation. Les traditionnelles vont super bien dans neige folle; c'est-à-dire là ou t'as des raisons de faire de la raquette! Dans les trails tapées, comme çà se fait aujourd'hui et que c'est un non-sens hilarant; les modernes vont moins briser sur la surface dure qui...n'a pas besoin de raquette!!!!!!
Et disons-le; les modernes vont bien aussi pour monter des montagnes, avec leur crampons...mais bon.Cà se faisait aussi avant! Çà prend juste plus de technique...

Oui; j'ai changé la photo de Chicken Joe.

Nathalie C. a dit...

Moi pis ma paire de belle raquettes rouges modernes, te remercions pour ce bel hommage à la mémoire de papa et des mille sentiers parcourus, pas à pas dessinant en ta mémoire des souvenirs précieux.
Quel beau texte!

Les raquettes modernes, à leur jeune âge, n'ont pas encore beaucoup voyagé comme l'ont fait les vieilles raquettes de bois. Elles ne portent pas en elles les souvenirs des hivers passés.

Mais si on écoute bien, les pieds au chaud dans nos bottes Merrel hi-tech, le crissement de la neige sous nos raquettes modernes, le craquement des arbres et le cri des oiseaux nous racontent eux aussi les souvenirs des temps passés...
Il suffit d'écouter...

(J'dis ça juste parce que j'en ai pas, moi, des vieilles raquettes!)

Pic à boo

Anonyme a dit...

On me chuchotte à l'oreille que Charles Baudelaire vient de se retourner dans sa tom...
Y'a de quoi j'pense ben..
salut

Sutton

Anonyme a dit...

La Fenêtre Brisée...
La raquette brisée...
Très tendance.!!
Renata

Anonyme a dit...

Moi j'en ai pas de raquette qui on marché depuis des lunes...
Mai j'en ai en alu...avec lesquelles, je marche plein.
Et qui sais, peut-être quelqu'un marchera dans mes raquettes et se souviendra...
J'espère sincèrement que tu pourra rafistolé tes raquettes afin qu'elles puisse poursuivre leur route, t'amenant ainsi vers d'autres horizons
Et nous, on en profite en te "suivant"
Louis

CAR ::: MAIL ART a dit...

J'ai tellement de plaisirs de vous lire... le post et les commentaires ! Un sourire, souvent un rire sur lequel se s'accroche une tite larme toute tite !

merci et bonne année !

Chantal